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ENTRE FRAYEUR, SUSPENSE, ET FASCINATION.
Interview de Nadège Laurens-Paget
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Interview de Nadège Laurens-Paget
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ENTRE FRAYEUR, SUSPENSE, ET FASCINATION.
Interview de Nadège Laurens-Paget
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Je m’appelle Jana Rouze. C’est à la fois mon nom, mon petit surnom depuis l’enfance, et un pseudo de plume. Je suis l’auteure de deux trilogies, soit six livres publiés depuis 2016.

Effet de Vague traite des violences de masse faites aux femmes après avoir vu un reportage sur les viols utilisés comme armes de guerre au Kivu, pour créer la peur et déplacer des populations, tout en jetant l’opprobre sur les femmes. On est bien avant #MeToo au moment où je l’écris. Pour moi, à ce moment-là, les violences sexuelles étaient des actes domestiques de la vie privée. Comme beaucoup de lectrices, je n’imaginais pas autre chose. Apprendre ce que subissaient mes contemporaines au-delà des frontières : la barbarie du viol devant leur famille, puis le rejet des maris, des pères, et des enfants, m’était insupportable.

Je l’ai écrit avec l’envie d’éveiller les consciences.

Scrap Metal traite de l’intégration des sectateurs une fois qu’ils sont sortis de la secte. Selon le temps qu’ils y ont passé, leur intégration est quasi impossible. Elle les conduit soit à la prostitution (destruction physique), soit à retourner dans une autre secte (destruction psychologique), soit au suicide paradoxalement pour les plus forts d’entre eux. Parmi eux, il y a des enfants, très souvent sans acte de naissance, car leurs mères sont coincées dans la polygamie. Ces enfants sont cachés des radars de l’État. Ce qui les rend encore plus vulnérables et les expose au trafic sexuel, puisqu’ils n’existent pas !

J’avais envie qu’on les voie.

C’est très difficile d’expliquer ça. Je les vois. Ils composent une famille de l’histoire. Au début, c’est un peu lent car j’apprends à les connaître. Ensuite, au fur et à mesure que je les maîtrise, tout devient plus facile. Je ne sais pas si je peux dire ça sans passer pour une schizophrène en rupture avec le monde réel, mais pour moi ils existent. Après, c’est comme jouer aux échecs. J’ai un plateau avec des pièces et des règles pour m’en servir.

Ça, c’est la question à 1 million ! Quelle part de moi y a-t-il dans tout ça ? Ça me fait peur de me la poser. Je serais tentée de dire zéro, mais ce ne serait pas vrai. Une chose est sûre, l’écriture permet d’exprimer ce que l’on n’arrive pas à dire à voix haute. Peut-être suis-je une rebelle ou une militante qui s’ignore ?

Il y a une chose que j’ai comprise en écrivant des séries qui impliquent des familles sur plusieurs générations. Le personnage principal n’est pas toujours au casting. C’est le destin. Dans Effet de Vague, tout part des trois pères qui se connaissaient étudiants et dont les agissements immoraux impactent violemment la génération suivante. Dans ScrapMetal, tout part du crime de la mère de l’héroïne et pourtant le personnage d’Anne n’est pas là. Elle est morte vingt ans plus tôt. C’est fascinant le destin. On lutte contre lui. On l’explore. On le suit.

J’aime beaucoup jouer avec.

J’ai un livre doudou qui ne quitte jamais ma valise. C’est le Petit Prince de St Exupéry. Ce livre m’émeut encore, parce qu’il y a dedans tout de ce qu’il faut dans la vie pour s’en sortir.
Chaque fois que je passe une mauvaise période, je le relis.

Je vais être franche. Je voyage beaucoup. J’ai vu beaucoup de villes. Certaines époustouflantes comme New York, Chicago, Hong Kong ou Singapour. Marseille est loin de tout ça, mais c’est la ville de la coolitude. J’aime son côté berceau des civilisations, sa tolérance et son ouverture d’esprit, son absence de stress, et la façon simple dont les gens se lient. Les festivals. Le foot. Les concerts sur la plage ou à ciel ouvert dans le stade. La mer. Les calanques. Les petits restos au bord de l’eau. La créativité qui fourmille…

Bref, j’aime vivre dans un endroit qui permet autant de dépaysement constant.

Pour moi, la lecture est synonyme de liberté ! J’aime cet instant privilégié rien qu’à moi où je suis en relation avec un livre. Aussi je lis de tout. C’est ma liberté et je ne reconnais à personne le droit de me dire ce qu’il faut lire ou ne pas lire. Il n’y a pas de lecture au-dessus ni en-dessous.

Juste des expériences différentes.

Je ne pense pas au succès. Je suis petite. Je pense à la pression de bien faire pour éviter de décevoir après un succès, et c’est une vraie tension. Il faut toujours progresser pour satisfaire les exigences des lecteurs qui ont la générosité de me suivre, continuer à les surprendre, à les rendre curieux. C’est ça que cette aventure m’a appris sur moi-même. Je dois avoir confiance en moi ou m’arrêter.

Et croyez-moi, pour moi, c’est nouveau.

Ha ça oui ! Depuis que je suis romancière, mes amis et ma famille ne me prennent plus jamais au sérieux quand je leur dis que je dois travailler. Pour eux, je raconte des histoires. Ce qui n’est pas faux, mais bon…

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